L’intelligence serait-elle un “virus” attendant mieux que l’Homme?

Et si l’intelligence était une entité autonome qui aurait pris pour support un des grands singes dont l’évolution permettait de lui assurer la survie?

La thèse centrale, et la plus choquante, est que l’intelligence, au sens exprimé ici, serait une sorte d’entité utilisant l’homme comme véhicule et cherchant, à terme, à se détacher de lui pour trouver un support plus approprié. Ex: la machine.

Il faut utiliser deux hypothèses pour y répondre, largement discutées dans le monde scientifique.

1. Un nouveau-né projeté au paléolithique supérieur – époque du cro-magnon, autrement dit des premiers représentants connus de l’homo sapiens, il y a 40’000 ans -, développerait-il des capacités extraordinaires en rapport à son époque?
2. Un des premiers représentants de l’homo sapiens aurait réussi à survivre jusqu’à notre époque. Se baladerait-il à poil dans les rues en brandissant sa massue? (A ce sujet, voir absolument le film "The man from Earth", 2007, réalisé par Richard Schenkman, écrit par Jerome Bixby, scénariste de Twilight Zone le film et de plusieurs épisodes du Star Trek des années 60)

A la première question, selon la majorité de la communauté scientifique, la réponse est: non. Un nouveau-né transporté au paléolithique supérieur développerait exactement les mêmes capacités que ses congénères, i.e il évoluerait avec ce que ses sens lui apportent au fur et à mesure de son évolution personnelle, constituant son intelligence propre à l’évolution de son époque. Pourquoi? Contrairement à ce qui est effleuré dans cet article, cela n’a aucun lien avec le cortex, mais c’est le neocortex qui distingue l’Homme dans son évolution des autres mammifères. Chez l’Homme, l’ampleur du neocortex, parfaitement identique au neocortex d’il y a 40’000 ans, a donné naissance au langage. A partir de cette habilité, celle de la communication, l’Homme a construit son savoir, l’a communiqué de génération en génération pour créer sa culture, son histoire (le dessin, l’écrit) et ses progrès.

A la seconde question, la réponse est aussi: non. Cet homme hypothétique aurait vécu 14’000 ans d’évolution de l’humanité. Pourtant il serait tout bonnement comme "n’importe qui", au sens où son neocortex n’aurait pas évolué dans un laps de temps si court, pas d’un iota en fait. Sa mémoire serait tout aussi sélective que la notre, et il ne se souviendrait que de certains moments importants de sa longue vie, tout comme nous, sauf que certains de ces moments se situeraient au Moyen Age, par exemple. Son savoir (comme: nourriture apportée à son neocortex) aurait évolué exactement au même rythme que les progrès de l’humanité. Exemple: quand les découvertes de Newton ont été augmentées de la relativité restreinte, son cerveau aurait simplement logé aux oubliettes les lois de Newton pour les remplacer par celles d’Einstein. Son intelligence, encore une fois au sens où elle est mentionnée ici (on ne parle pas de sagesse, de connaissances intrinsèques, de psychologie freudienne, d’archétypes etc…), aurait suivi les connaissances immanentes au présent.

Donc l’intelligence en effet n’est pas innée, le cerveau de l’Homme actuel est capable de "recevoir" l’ensemble des progrès actuels dans le temps d’une vie, mais il n’en sait rien avant sa naissance. A vrai dire, il serait capable de recevoir bien plus (pour les soucieux). Par contre il ne sera jamais capable dès sa naissance de recevoir plus que les connaissances que son temps pourront lui apporter. Il pourra cependant les assimiler, en faire une théorie, et peut-être de ce pas faire avancer l’humain vers un autre progrès.

Pour revenir après ces considérations à la question initiale, oui l’intelligence mentionnée ici est indépendante de l’Homme en tant qu’individu, mais elle n’est pas indépendante de l’humanité dans ses progrès. Elle ne peut pas être considérée telle une simple superposition étrangère aux niveaux simiesques de l’humain. En réalité elle représente l’acquis de l’humain et, de façon plus significative, l’acquis de sa capacité (elle, innée) à communiquer. Autrement dit l’intelligence en soi n’est qu’un support acquis pour appréhender ce qu’on veut bien lui communiquer (inné). Elle s’appuie sur la constitution biologique actuelle du cerveau de l’Homme.

Enfin, l’intelligence artificielle. Contrairement à ce qu’on pourrait instinctivement se représenter par cet article, et relativement à tout ce que je viens de détailler, on ne peut pas donner à la machine plus que ce qu’on pourrait donner à un nouveau-né. Même si cette machine est douée initialement d’une capacité de calcul plus grande que celle d’un nouveau-né, donc d’un "neocortex" artificiel infiniment plus affamé, elle ne pourra jamais "savoir" plus que ce que l’intelligence de l’Homme peut lui offrir au moment de son apparition. Donc l’intelligence ne sera pas une "entité" bondissant d’un être à un autre par souci de prolifération, mais elle incarnera au contraire l’humanité entière qui s’offrira à la machine dans le stade actuel de ses connaissances. Ensuite, à la manière de ceux qu’on nomme "génies", cette intelligence saura peut-être en faire un avancement d’une autre nature, que nous, homo sapiens, nommeront "artificielle".

En résumé, pour ceux qui lisent tout en bas, la contradiction dans cet article vient du fait que l’intelligence y est à la fois considérée comme acquise, du fait de nos antécédents préhistoriques, et à la fois, dans sa propension fictive à vouloir "dépasser" l’Homme, comme innée: car on ne peut pas envisager l’intelligence comme un virus de l’Homme se propageant de génération en génération sans être "acquis". L’intelligence, c’est l’humain.

J’aimerais, en parallèle, insister sur le fait que ce qui a permis à l’intelligence, acquise, de se développer, est la capacité extensive à communiquer. Or s’il y a bien une chose qui est d’actualité, c’est la communication. Jamais, dans nos progrès, la possibilité et par conséquent la propension à communiquer n’ont été si puissantes. Tellement par exemple que beaucoup de mères craignent la société parce qu’elles ont peur que leurs enfants en verront trop, trop vite. Alors qu’en termes biochimiques il est établi que le cerveau ne PEUT pas être dépassé par ce qui lui est apporté par l’évolution de ses congénères (paradoxe bio-culturel). Néanmoins la communication s’intensifie depuis les années 80 de façon notoire. Donc la possibilité pour un enfant de recevoir ce savoir est d’autant plus grande, dans un laps de temps déterminé. Et là on peut relever une statistique intéressante, aussi dans le cadre des suppositions de cet article: ce n’est pas parce qu’on peut donner plus de savoir plus vite qu’il y a plus de génies…

J’espère avoir un peu éclairci le sujet. Je souligne le fait que le mystère reste sur la destinée de l’Homme après qu’une intelligence artificielle ait acquis son savoir, ses progrès, son intelligence.

Mais ça, la sf s’en occupe mieux que moi.

 

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Remarques:

Un nouveau-né se nourrit à chaque seconde de la totalité de notre savoir dès sa naissance, la différence avec une AI réside uniquement dans la manière et la vitesse de communication de ce savoir. L’AI ne pourrait pas en savoir plus, ou disons qu’elle pourrait en savoir plus de par la rapidité de ses mécanismes et de sa capacité à se connecter à l’information. Mais une fois qu’elle a tout, elle en fait quoi? Elle ne pourrait aller plus loin.
C’est dans sa capacité d’abstraction et d’imagination, par rapport à tout ce qu’elle sait, qu’un avancement inhumain (artificiel) serait envisageable. Or cette capacité-là ne pourrait lui être communiquée que par l’homme.
A ce moment la question revient à: cette capacité d’abstraction ne serait-elle qu’une somme de calculs dépassant l’intelligence du créateur? Ou, par défaut, le créateur ne peut-il pas la lui communiquer parce qu’il ne peut pas être plus que ce qu’il est lui-même dans sa totalité individuelle?
Si un génie peut aller au-delà de tout ce qu’il a appris des progrès de l’humain, et inventer quelque chose de nouveau, comment la machine pourrait en faire plus, alors qu’elle est issue du génie?
Car sa capacité de calcul serait elle-même proportionnelle à ce que l’Homme est capable de lui donner, et donc cette abstraction dont elle serait douée serait elle-même liée à son créateur.
Donc par définition, l’inventé ne pourra jamais aller plus loin que l’inventeur.

2 réponses

  1. Non en fait je ne suis pas d’accord avec mes dernières remarques. Je suis plutôt d’avis que la capacité d’abstraction elle-même est le résultat d’une puissance de calcul définie. Par conséquent une intelligence artificielle développée de façon appropriée (je ne vais m’avancer sur le type de développement) *pourrait*, prendre conscience de soi, élaborer des concepts abstraits et faire de nouvelles découvertes.

  2. Avatar de skoliad
    skoliad

    A quand un article sur la contagiosité de la bétise ? Au fait, tu as vu la vache qui rit ?

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