Bestiaire magaliesque

Le regard qu’elle m’a lancé quand je suis entré dans l’arène, suave affamée souple, la panthère aux muscles tendus m’a dévisagé. Mes muscles se sont raidis. Désir brut. Peur brute.
J’ai rendu son regard à l’animal. Mais alors il a été un petit oiseau qui a voltigé dans sa cage. Je pense qu’il a essayé de m’attendrir ou de me faire rire. J’ai voulu l’attraper. Humour décalé.
Soudain ça a été un rapace, il a bondi sur mon avant-bras et figé son regard dans le mien en inclinant la tête, intrigué par ma poigne. Ses yeux, purs, directs, sans barrière, sans limites. Intelligence et défi.
Il a écarté ses ailes et l’arène s’est remplie d’eau. J’ai cru me noyer un instant. Dans la confusion des tourbillons j’ai distingué une forme glissant vers moi. Le dauphin m’a observé en rigolant et il a glissé contre moi en sifflotant, m’invitant à l’attraper et on a dansé en suspension. Sensualité, désir.
Je suis tombé contre un sol sec et doux de savane. Une biche fière m’a rendu mon regard, sévère, puis elle a eu comme un sourire en inclinant la tête, elle s’est mise à courir pour que je la poursuive mais elle allait trop vite. Jeux, espièglerie.
La femme qui est apparue alors dans la chaleur, nue, mince, accroupie sur le sol de savane, avait l’air triste. Elle n’a pas vraiment fait attention à moi. J’ai uniquement compris que quelque chose en elle me dépassait. Mélancolie et vastité.

Et puis seul chez moi la nuit sur les lumières de la ville elle m’a manqué, soudain j’avais besoin de ses mots, et je m’effrayais et me fascinais comment en un temps si court une inconnue (mais l’était-elle?) pouvait me manquer.

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