L’Ordinateur (1)

Le poids de l’émotion peut s’attacher à n’importe quoi. Un objet, une forme, un souvenir, un visage, une carotte. Pourquoi pas un site Internet ? Il s’agit de transférer en ce site tout ou partie de son existence émotionnelle, afin de le rendre particulièrement sensé, afin de charger cette virtualité du rôle d’allégement émotionnel. Alors, le site prend corps, il devient vivant. Il devient le site qu’on aime parce qu’on y a mis un peu de soi. Et plus on donne d’effort à y être, dans ce site, à y exister dans le prolongement de l’acte de déchargement émotionnel, plus il se charge, plus il devient sensé. Les autres qu’on y croise sont donc signifiants, parce qu’ils partagent tous ce poids émotionnel qu’ils y ont mis.
La comparaison avec la drogue est cependant une association facile : il n’y a pas dépendance, mais intensité, il n’y a pas manque, mais besoin. Le tissu des relations est d’autant plus dense que le besoin de faire exister son émotion ailleurs est fort.
Ceux qui s’effacent du site ne se suicident pas, ils disparaissent tout au plus du tissu des relations; mais le poids de l’émotion, ils le transfèrent encore ailleurs.
Cette symbolique n’a d’égal que son illusoire sensation de renaissance : on ne recommence rien, car on répétera cet effacement ailleurs, autrement.
L’Ordinateur est partout.
Vive l’Ordinateur.
Sourire.

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