Manifeste d’un pendulaire Lausanne – Genève : H. | Les posivitrons

Sourire en coin, je relève chez ces "je" que j’incarne avec tendresse la noirceur d’un univers tissé dans la révolte, le dégoût, le besoin puéril de révolution globale, un "kill-them-all" littéraire, qui n’est pas sans rappeler la Beat Generation, mais en plus noir et en moins jouissif. Il existe cependant des créatures qui procèdent à l’inverse d’un optimisme global entretenu par une application quotidienne à voir le bon côté des choses. Ce sont les posivitrons. Ils sont cultivés, savent s’exprimer, lisent passablement, sortent autant que possible et ont toujours une opinion sur tout, de la politique américaine à la représentation des cétacés chez les Esquimaux. Ils ont des idées et ils font aussi, pour les plus élaborés d’entre eux, beaucoup de théories. Pareillement aux mélancoliques, ils n’agissent pas beaucoup, ou alors leur production est surtout calquée sur leur travail tel que journaliste, pdg, CIO, moine zen, acteur, designer, physio… Travail intellectuel qui les conforte dans leur action directe sur le monde, mais qui en réalité représente un échange avec des êtres qui leur sont similaires pour qu’entre eux ils puissent continuer à discuter tranquillement sur une terrasse pleine de jeunes filles belles, faciles et aisées, autour d’une "bonne bouteille". Avant tout, il sont "conscients": ils considèrent le "monde" avec "une ouverture désintéressée", et du haut de leur acuité ils savent que cet ensemble qu’ils se représentent comme "le monde" est loin d’être beau ou réussi, mais (vaste et noble "mais") il vaut la peine d’être vécu, d’être saisi à pleines mains, d’être ressenti avec passion et acharnement, de s’y jeter corps et bras (dans l’esprit), car même si tout n’est pas si beau on peut toujours y apporter soit-même son meilleur et élever le karma de l’univers en même temps que le sien propre. Un truc dans le genre. Ils sont assez drôles: je les déteste avec lassitude. Leurs gazouillis sont aussi déprimants que l’inlassable retour des hirondelles. Leur fécondité n’a d’égal que leur inutilité et leur désuétude, et si mon constat est à l’inverse amer et cinglant, j’imagine qu’il y verront une forme d’équilibre zen; parce que pour laisser leurs crottes partout il faut aussi qu’ils avalent et interprètent tout.

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