Amitiés

J’ai longtemps cru que l’amitié, la vraie, quoique séparée par les ans ou les distances (ou les deux), n’en resterait pas moins l’amitié, la vraie. Quoiqu’il advienne, passant par-dessus tout, les luttes, les concurrences, l’ego, le vide même, tout quoi. Je tenais l’amitié en plus haute estime que l’amour.

Déchanté.

Il y a 3 ans déjà , lorsqu’une irrémédiable dispute nous avait séparé, mon ami Christophe Meyer et moi, autour d’un projet commun, la réalisation d’un film. Nous nous connaissions depuis un bail, rien à faire, depuis lors nous ne nous revoyons plus. Il m’accusait d’avoir pris inconsciemment trop de place dans son projet.

Ca fait partie du charme de ma naïveté. Sauf qu’elle n’est pas charmante, elle est tout au plus bourgeoise, ma naïveté.

Bourgeoise, voilà un terme que j’utilise à bon escient. Plus récemment, un ami de longue date, Théo Bondolfi, que je n’avais plus revu depuis 5 ans, nos histoires respectives étant simplement parties sur d’autres chemin, du moins est-ce ma perspective sur cette longue séparation, et bien cet “ami” m’a avoué que de son côté il ne souhaitait plus “entretenir” notre relation, car j’avais trop nui à l’épanouissement de ses projets professionnels… Mon petit plaisir individualiste et bourgeois, traduis-je de lui, ne correspond pas à son éthique de l’amitié.

Voilà , encore une fois ma naïveté tombe des nues. Je ne m’explique pas comment on peut être à un moment si proches, et à un autre moment, si lointains. L’amitié, pour durer, devrait toujours être teintée d’un rationnalisme froid que l’amour ne peut revendiquer. L’amitié, c’est de l’amour sans émotions. Ou du moins sans émotions débordantes, incontrôlables…

Oui j’y croyais, à ça. Mais non. Même au tréfond de la rationnalité se cache de l’émotion. Théo en est bien la preuve. La chute de l’amitié en est bien la preuve. Toute pensée, aussi rationnelle que celle-là même que j’évoque maintenant, est issue d’une émotion.

Ma conclusion est la suivante. Une amitié peut exister tant que l’émotion est suffisament contrôlée pour ne pas revendiquer une raison de rompre. Mais bizarrement, cette émotion dont je parle n’est pas contrôlée par la raison, elle se gère elle-même, elle fonctionne en mode d’auto-contrôle. Et de ce fait, l’amitié vraie est la domination absolue de l’émotion sur la raison.

Que penser de l’amour ? N’est-ce pas, afin qu’il dépasse les ans, exactement l’inverse ?

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