“L’étranger”, suite et fin

Derrière les barreaux le ciel bouge. Il passe du petit matin au jour puis la lumière aveuglante de l’après-midi, qui rougit, sombre, disparaît. La lumière ne me manque pas. Je repense parfois à la question du juge. Pourquoi, pourquoi avoir encore tiré quatre coups alors que le corps était déjà à terre, alors que sans doute il était déjà mort. Oui pourquoi. Je ne trouve pas de réponse et à nouveau l’aube ronge mon petit carré de ciel. J’écoute les pas, les murmures, mon ouïe est de plus en plus fine. Je sais qu’ils ne tarderont plus. Parfois aussi, je pense à Marie. Je ne la regrette pas, je lui souhaite une vie belle. Je sais qu’elle rencontrera quelqu’un d’autre.
A la naissance du jour, j’ai souvent cette peur glaciale qui me tord l’estomac. Je vois la lame brillante de la guillotine dans le ciel et c’est sans espoir, c’est tellement sans espoir que je me sens rongé de l’intérieur par le vide et je tremble de tout mon corps. Puis, ça passe.
Et puis ils sont venus.
C’était comme je l’avais imaginé. Très bête, très simple, un peu caché dans une arrière-cour de la prison. Un autre jour naissant de plein soleil, comme il y en aurait encore beaucoup d’autres après. Après… Il y avait quelques gardes tétanisés, le directeur de prison et mon avocat. J’ai été un peu surpris de le voir. Il avait l’air sur ses gardes, bien que je ne lui en voulais pas. Je ne voulais rien à personne.
Il faisait encore frais au petit matin et j’ai respiré profondément une dernière fois en entendant le glissement suave de la lame tombant sur ma nuque.

Fin possible de “L’étranger” de Camus.

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